Un soir tranquille, j’avais décidé de laver une bouteille de jus de myrtille avant de la mettre au recyclage. J’ai une certaine passion pour ce fruit, et étant follement friande de tartes aux myrtilles, je m’étais dit que dépenser une fortune pour goûter ce qui aurait dû être la myrtille dans sa forme la plus pure et absolue, la quintessence de la myrtille, le nectar des dieux, valait tout à fait le coup.

Le meilleur allié du tiramisu à la myrtille

Ce ne fut pas exactement le festival de saveurs auquel mes papilles s’attendaient, et je dus le finir prestement. Avant de mettre la bouteille au recyclage, je la lavai succintement (afin de ne pas tacher mon sac poubelle), et quelle ne fut pas ma surprise quand je constatai que le résidu rose-rouge au fond de la bouteille colora la bouteille (à présent remplie d’eau) de … violet foncé.

Autant dire que mes connaissances en théorie des couleurs n’auraient pas prévu ça : un résidu rouge aurait dû donner un liquide rouge, pas violet!

Mais je me doutais de ce qui se tramait : quelque chose dans le reste de jus avait réagi avec l’eau. Encore fallait-il identifier le coupable de la réaction. Une petite recherche google m’informe que les myrtilles sont des fruits chargés en anthocyanes, une famille de pigments trouvés dans les plantes. Les végétaux ont tendance à synthétiser des pigments pour plusieurs raisons : protection contre les herbivores en rendant la feuille ou le fruit âcre, guidage des pollinisateurs vers les fleurs, protection contre les trop fortes lumières, réverbération de la lumière pour pouvoir en capter plus… c’est extrêmement divers, et pour le cas présent, je ne connais pas la fonction du pigment dans la myrtille , donc je me tairai.

Ce qui est sûr cependant, c’est que les anthocyanes sont sensibles au pH du liquide dans lequel elles se trouvent : elles changent donc de couleur en fonction du pH!

Le pH, c’est (en gros) le niveau d’acidité d’une solution (un liquide donc). Il varie de 0 (pH acide) à 14 (pH basique), et pour information, l’eau pure a un pH de 7, considéré comme neutre. Une solution est acide quand son pH est inférieur à 7, et une solution est basique quand son pH est supérieur à 7. Donc quand j’ai rempli la bouteille d’eau, j’ai créé une solution à pH 7 qui contient donc des anthocyanes de myrtille.

On sait donc qu’à pH 7, l’eau à la myrtille devient violette. Mais que se passe-t-il quand le pH est basique ou acide?? L’hypothèse est qu’on obtient des couleurs différentes.

J’ai donc rempli 2 verres à partir de cette eau à la myrtille, et en avant les expériences!

Pour commencer, j’ai attrapé le premier liquide acide que j’avais dans mon frigo : le jus de citron! Et excitée comme une puce j’en verse dans le premier verre : gagné! La solution passe de violet à rose. Sachant que c’était la couleur du jus avant que je n’y ajoute une grande quantité d’eau, on peut en déduire que le jus était acide au départ (ce qui était précisément le goût qui m’avait déçue au départ, je savais que ce n’était pas moi qui n’aimait pas les myrtilles mais leur jus qui est trop acide à mon palais!).

Je me suis mise ensuite en quête d’un liquide basique (qui ne soit pas dangereux) : le savon de Marseille! J’ai donc ajouté de l’eau savonneuse à l’eau à la myrtille : la solution est passée du violet au bleu-vert.

En haut : les verres d’eau à la myrtille
Au milieu : ajout de jus de citron dans le verre de gauche, l’acidité le rend rose!
En bas : ajout de savon dans le verre de droite, la basicité le rend bleu-vert!

On sait donc maintenant que les anthocyanes contenues dans les myrtilles sont capables de changer de couleur, passant du rose au bleu selon le pH de la solution!

Expérience à faire avec vos enfants, ou en tant que grand enfant, en tous cas ce fut très drôle à concevoir!

Merci à ma moitié d’être aussi folle que moi et de s’amuser à faire de la chimie à des heures indues.